Les caractéristiques générales de la littérature Siddha sont souvent résumées en une attitude négative vis-à-vis des autorités, des rituels, de la société castes, des écritures sacrées ou plutôt de l’attitude dévotionnelle envers celles-ci. Pour être plus juste, ce n’est pas tant que les siddhas s’opposent à ces choses tout en voulant leur substituer d’autres, mais plutôt ils jugent que ces choses divertissent des moyens réels pour parvenir à son but. Elles manquent d’efficacité réelle en ce qui concerne la libération. Les écrits de Pascal sur le divertissement et la concupiscence (désir ardent des biens terrestres) ont la même portée.
apprécier la renommée, redouter la mauvaise réputation
apprécier la louange, craindre le mépris et les critiques
apprécier le bonheur, craindre la souffrance
Dans l’étude et la lecture des écritures,
Les cendres sacrés et les saints écrits
Ni dans la récitation de prières
Tu n’y trouveras pas le Seigneur !
Fonds-toi dans le cœur intérieur
Et proclame la vérité
C’est là que tu rejoindras la lumière-
Une vie sans servitude. »
' Je connais à fond le suprême bien ' (disent-ils).
Un peut-être parmi dix millions s’est attaché à l’Immaculé.
Les savants mettent leur orgueil dans les Traditions, dans les Veda et dans les Purāna. Ils tournent au-dehors comme les abeilles autour du bel mûr.
L’immobile englobe la pensée de l’éveil (bodhicitta) malgré la poussière qui l’entoure.
On voit la graine du lotus, pure par nature, dans son propre corps. »
Prenant une motte de terre, de l’eau et de l’herbe Kuśa, ils lisent ; assis dans leur maison, ils offrent l’oblation au feu. C’est en vain qu’ils apportent l’oblation, se brûlant les yeux à la fumée âcre. »
(Saraha, Dohākoṣa, traduit du vieux bengali par M. Shahidullah)
La critique des Brahmanes et leur utilisation des Vedas est commune à de nombreux sectes de renonçants, mais dans le dohākoṣa cité, Saraha applique avec humour la même critique aux Shivaïtes, aux moines nus Jaïna (Digambara) et n’épargne pas les bouddhistes.
Tu t'es satisfait du sens (littéral) et du texte, (mais) tu ne connais pas le sens suprême: tu es un pauvre sot!
86. Fiers de leurs (connaissances) scriptuaraires, d'elles seules, ils ne considèrent pas la cause (première): comme de malheureux équilibristes, experts au maniement du bambou, ne font rien de plus que gesticuler.
125. Ils sont beaucoup à gronder entre eux à propos du texte des six systèmes philosophiques;
la cause, elle, est unique, suprême : ils croient le contraire !
126. Ceux qui sont versés dans les Siddhānta, Purāna, Veda, pauvre enfant, auront à ne s'y pas tromper :
c'est (seulement) dans la mesure où on a la félicité comme viatique que, pauvre enfant, on vous dit Parfait. »
(Yogindu, l’Offrande de distiques, traduit du vieux bengali (apabhraṃśa) par Colette Caillat)
(Lumière de l'absolu, paramaatmaprakaasa, traduit du vieux bengali (apabhraṃśa) par Nalini Balbir et Colette Caillat pp. 100-101)
L’Avadhūt gītā attribué à Dattātreya, texte post-Śankara probablement datant du XIIème siècle, dit sensiblement la même chose :
34. Certains prônent le non-dualisme, d’autres le dualisme. Ils ne connaissent pas
35. Comment décrire la suprême réalité, puisqu’elle n’est ni blanche ni d’une autre couleur, n’a ni qualités comme le son, et est au-delà de la voix et du mental. »
(Avadhūt gītā, Hari Prasad Shastri p52)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire